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Le 21 février 1916 débutait l’une des batailles les plus meurtrières de la Première Guerre mondiale : la Bataille de Verdun laissant derrière elle des centaines de milliers de vies brisées et un paysage marqué à jamais.

Il y a une semaine, nos élèves de 3e ont marché sur les traces de l’Histoire en se rendant à Verdun. Cette démarche s’inscrit dans une volonté plus large de transmission de l’Histoire, qui ne se limite pas à la Première Guerre mondiale mais englobe aussi les tragédies du XXe siècle.

Verdun c’est…

des sacrifices héroïques pour défendre le bien le plus cher : la liberté
les cicatrices de la haine des hommes qui persistent malgré le temps
des terrains encore pleins d’impacts d’obus
des milliers de croix blanches à perte de vue
un fort qui a résisté grâce à ses galeries et ses murs de 2m50 d’épaisseur
un champ de bosses
se promener innocemment là où d’autres ont vécu un enfer
des grandes salles froides pleines de stalactites et de stalagmites
des hommes braves enterrés dans ces contrées
un calme éternel
des hommes morts à cause d’autres hommes
un lieu incarnant toute l’horreur de la guerre
500 personnes recluses dans un fort, parfois touchées par la démence
des terres noyées d’Histoire, de mélancolie et d’espoir,
des stèles dans le cimetière montrant que des étrangers venaient combattre avec les Français
des milliers d’ossements
un endroit historique et sanglant qui est la tombe d’un grand nombre de soldats
un fort bombardé de 200 obus par heure pendant 7 jours
des soldats qui ont offert leurs vies pour que nous, nous puissions vivre
des lettres de poilus demandant à leurs mères pourquoi elles les ont mis au monde
un silence sourd
un grand champ troué
des armes, des casques, des uniformes, des décorations
des hommes enfermés dans un fort réduits à lécher les murs pour ne pas mourir de soif
le drapeau du cimetière qui virevolte dans le ciel
des objets témoins de la vie au front
gravé dans la pierre comme dans la mémoire : PAX

Mais grâce à ceux qui ont donné leur vie pour que nous soyons vivantes et joyeuses, Verdun pour nous ce fut aussi:
Une heure et demie de calme dans le car
Quelques secondes de soleil
Des litres de thé brûlant
Des élèves en jupes et après-ski
Une voix mélodieuse qui s’élève dans le cimetière
Une élève malade, malade, malade
Des bonbons, du chocolat, des sucreries
Des cahiers de latin pour réviser
Quatre élèves abandonnées dans le cimetière
La photo d’un aïeul célèbre dans le musée
Des troupeaux de jeunes filles galopant dans la prairie
Des profs qui n’arrêtent pas de papoter
Beaucoup d’enthousiasme et de curiosité intellectuelle
Des blagues
Des élèves qui chantent en polyphonie
Un chauffeur qui demande si nous sommes cathos
Un bonnet jaune à pompon qui guide toute la troupe
Un sac à main qui porte le nom d’un auteur renommé
Cinquante-cinq demoiselles dans les toilettes des hommes
Des élèves qui prient la Vierge dans le carré des Musulmans
Un appareil qui développe les photos tout seul
Un conducteur de bus qui râle
Quelques secondes de neige
Des petits cris effrayés sortant des casques de réalité virtuelle
Des grappes d’élèves bras-dessus, bras-dessous
Un grand bol d’air glacé
De la joie, des rires, tellement de vie !

MERCI !

Les élèves de Troisième et leurs professeurs

Dans cette même optique de mémoire, nos élèves germanistes ont également eu l’honneur d’écouter le témoignage d’Esther Sénot, arrêtée à l’âge de 14 ans et rescapée d’Auschwitz. Son récit, bien que lié à la Seconde Guerre mondiale, trouve un écho direct dans la visite de Verdun : les guerres successives ont laissé des traces profondes, et les leçons à tirer de ces événements restent universelles.

« Nous ne sommes plus qu’une poignée de survivants des crimes nazis.

C’est à vous, les enfants, que je m’adresse maintenant. Lorsqu’on n’aime pas son voisin parce qu’il est différent, cela s’appelle du racisme. Ce racisme a conduit à la déportation de millions de personnes innocentes.

C’est au nom de ce racisme que les pires horreurs sont commises et pourtant, tous les enfants du monde sont pareils à vous.

Je compte sur vous, mes enfants, pour que, lorsque nous ne serons plus là, nous qui avons connu les camps, vous puissiez certifier en notre nom à tous qu’ils ont bien existé face aux négationnistes, aux révisionnistes et à tous les autres faussaires de l’histoire.
Vous devenez maintenant nos témoins, comme nous-mêmes avons été les témoins et victimes de ces atrocités.

Faites preuve de tolérance, acceptez d’être différents les uns des autres, car la haine de l’autre conduit aux pires atrocités. Je vous fais confiance, ne nous décevez pas.

Vous vivez en France, dans un pays démocratique : mes enfants, essayez de protéger ce pays le plus longtemps possible. »

Esther Sénot