Le 27 novembre dernier, Jean-Michel Blanquer annonçait son intention de généraliser les ciné-clubs dans tous les collèges et les lycées. Professeur de français aux Vignes et spécialiste de cinéma, Sabine de la Moissonnière n’a pas attendu ce communiqué pour ouvrir ses élèves à l’analyse filmique. Son ouvrage Eduquer par le cinéma témoigne d’une pédagogie travaillée depuis 10 ans.
Pourquoi avez-vous écrit ce livre ?
Sabine de la Moissonnière: Pendant 10 ans, j’ai animé un ciné-club paroissial à Saint-Ferdinand des Ternes. Tous les 15 jours, je choisissais un nouveau film pour les collégiens et je leur proposais une analyse de l’œuvre, dans toutes ses composantes. Le succès du club nous a conduits à en créer un autre à destination des lycéens. Le curé de Saint-Ferdinand m’a finalement poussée à éditer l’ensemble de mon travail, qui pouvait être utile à bien des éducateurs : parents, professeurs, animateurs de pastorale, prêtres ou encore séminaristes. Depuis la parution, même les étudiants se sont montrés intéressés !
Comment se présente l’ouvrage ?
S.delaM : C’est une sorte de petit manuel pédagogique organisé par chapitres autour de différents thèmes : le rapport au père, à Dieu, le sport, l’humour, etc. Dans chaque chapitre, je propose une analyse approfondie de quelques films ainsi que des notices critiques sur d’autres œuvres. Je conclus par une liste de films complémentaires. Tous les genres cinématographiques sont représentés, ainsi que toutes les époques. A la fin de l’ouvrage, les éducateurs trouveront aussi un glossaire des techniques d’analyse filmique.
Le choix des œuvres est-il soumis à un prisme chrétien ?
S.delaM : J’ai voulu d’abord choisir des œuvres que l’on pouvait montrer à tous les jeunes à partir de la 4è, en cherchant à bannir – autant que possible, car c’est malheureusement de plus en plus rare – les œuvres qui présentent des scènes violentes ou érotiques. Les films choisis doivent être aussi suffisamment riches pour être « analysables » et ils possèdent aussi des qualités esthétiques indéniables : le principe est d’éduquer à la beauté ! Pour chacun des films, j’ai proposé une lecture chrétienne possible en fin d’analyse.
Qu’est-ce qui explique le succès de votre démarche ?
S.delaM : Aujourd’hui, il n’est plus possible de faire l’économie du cinéma ! L’analyse fine des œuvres cinématographiques suscite des réactions fortes : les éducateurs sont rarement habitués à une telle démarche, et ils sont sidérés par ce qu’ils arrivent à (faire) découvrir. Du côté des enfants, ils sortent souvent avec enthousiasme d’un film en noir et blanc perçu au départ comme lent et « sans action »… Et ils sont ravis d’avoir l’impression de maîtriser certaines choses mieux que leurs parents ! C’est pourquoi le « ciné-club » fait partie intégrante de mon travail avec les 4è. Qui sait, peut-être un jour parviendrons-nous à lancer un ciné-club pour toutes les classes, entre midi et deux ?
Eduquer par le cinéma, éditions Le Centurion, 26 juin 2018 – 293 pages.